Traitez un individu comme il est, il restera ce qu’il est.
Traitez-le comme il doit et peut devenir, il deviendra ce qu’il doit et peut être.Johann Wolfgang von Goethe
On parle souvent des difficultés liées à l’école mais on parle rarement de celles rencontrées lors des activités extrascolaires.
Je me souviens encore quand ma mère nous mettait, ma soeur et moi, au centre de loisirs de notre commune, le mercredi après-midi et les vacances parce qu’elle travaillait. Je détestais y aller. N’avoir aucun moment de paix, être obligée de jouer avec tout le monde, ne pas arriver à m’entendre avec les autres enfants. Je voyais uniquement des contraintes dans ces après-midis. Heureusement, il y avait ma soeur à qui je m’accrochais comme une moule à son rocher.
L’école primaire, la fin de l’innocence
C’est aussi à cette époque que je n’ai plus pu manger à la cantine. J’avais mal au ventre chaque fois que je devais y aller. C’était uniquement les vendredis midis mais pour moi, c’était déjà bien trop. La cantine m’a fait vivre mes premiers chocs psychologiques.
En tombant malencontreusement à une table de grands alors que je n’étais qu’au premier trimestre du CP, j’ai tristement découvert que le Père Noël et la Petite Souris n’existaient pas. C’est à cet instant précis que j’ai compris que les adultes étaient tous des menteurs, mes parents en première ligne. Je l’ai tellement mal vécu que je me demande encore aujourd’hui si je vais faire croire à mes enfants que c’est le Père Noël qui dépose les cadeaux au pied du sapin.
Peu de temps après, deuxième mésaventure. Un des instituteurs m’a forcée à manger mes carottes râpées. Je détestais les carottes. Je les ai mangées et puis je les ai vomies. Après ces deux incidents qui avaient pratiquement eu lieu coup sur coup, impossible de me faire manger à nouveau à la cantine de l’école. J’étais braquée et complètement angoissée. Mes grands-parents ont dû prendre le relai pour que je puisse retourner à l’école en étant apaisée, sinon j’avais une boule au ventre dès le matin.
Quelle activité choisir pour un enfant zèbre ?
Très jeune, j’avais besoin de me dépenser. Je pouvais passer autant d’heures à lire dans ma chambre qu’à construire des cabanes dans la forêt. Je courais partout, je jouais beaucoup et j’aimais tous les sports. Mes parents essayaient de me faire faire des activités avec d’autres enfants mais comme pour le centre de loisirs, c’était le supplice. Je refusais qu’on me laisse et je ne parlais à personne.
J’ai essayé la gymnastique sans grande conviction parce que mes cousines s’étaient inscrites. Dès que nos mères sortaient de la salle, j’étais stressée. J’avais une peur irrationnelle de l’abandon. J’ai vite arrêté, déjà parce que je n’étais vraiment pas douée et parce que je n’aimais pas du tout la personne qui nous entraînait. Elle était tyrannique alors qu’on avait cinq ans !
J’ai tenté le judo parce que ma grande soeur était inscrite depuis plusieurs années mais, là encore, le succès n’était pas au rendez-vous. Puis, un jour, mon père m’a emmené à un entrainement de basket. Dès que j’ai touché mon premier ballon, j’ai tout de suite su que c’était ce que je voulais faire.
Le refus de l’échec
Déjà, c’était rigolo ! Je pouvais courir partout, jouer avec un ballon et la jeune qui nous entrainait était gentille et accessible. Et puis, j’étais douée. J’ai tout de suite eu d’énormes facilités balle en main et ça me rassurait. J’avais du mal avec l’échec. Je refusais d’être nulle dans quoi que ce soit. Il fallait toujours réussir. Toujours être douée. Quand je n’y arrivais pas, je perdais tous mes moyens et je refusais de recommencer.
La peur de l’abandon
Malgré mes facilités, je refusais d’aller jouer si l’un de mes parents ne restait pas pendant l’entraînement. Même aujourd’hui, j’avoue que je ne comprends pas pourquoi c’était si difficile. Je me rappelle ce que ça me faisait ressentir, mais pourquoi j’avais si peur, je ne sais pas. Peur qu’il arrive quelque chose ? Peur de ne pas y arriver s’ils n’étaient pas là ?
C’est encore mon grand-père qui a été missionné tous les mercredis après-midi pour m’accompagner à l’entraînement. Avec le recul, heureusement que mes grands-parents maternels étaient relativement disponibles pour venir au secours de mes parents parce que sinon, je ne sais pas comment ils auraient réussi à gérer.
Ménager les enfants quand on est instituteur, animateur, entraineur…
J’ai continué le basket pendant des années. Je crois que ce que j’aimais, c’est qu’il n’y avait pas besoin de parler, le jeu suffisait. La seule chose qui me terrifiait, c’était d’être la dernière choisie dans une équipe. J’en profite pour donner un conseil à toutes les personnes qui entrainent des enfants en association ou dans les écoles : faites vous-même les équipes. Psychologiquement c’est très violent d’être le dernier choisi. L’enfant a l’impression d’être nul, pas intéressant et qu’il ne vaut rien.
Seriez-vous prêts à revivre cela en tant qu’adulte ?
Être la dernière personne choisie, la dernière personne invitée ou la dernière personne informée ? Non, même aujourd’hui c’est toujours violent alors imaginez l’impact sur un enfant, et qui plus est, un enfant zèbre ou hypersensible.
Communiquer, rassurer, sécuriser
Quoiqu’il en soit, je ne voulais toujours pas m’entraîner sans que quelqu’un reste dans les gradins. Mes parents ont fini par me feinter. Un jour, mon père est venu sauf qu’après cinq minutes, il s’est levé et il est parti. Je l’ai vécu comme une véritable trahison mais j’ai fini par m’habituer et m’entrainer sans que personne ne reste dans les tribunes.
J’ai joué au basket pendant vingt-cinq ans dont plusieurs années en championnat semi-professionnel après être passée par plusieurs centres de formation.
Avec le recul, je crois que j’aurais juste voulu être préparée. J’aurais aimé que mes parents m’expliquent, comme pour l’école, pourquoi ils ne pouvaient pas rester à tous les entraînements. Que ce n’était pas qu’ils ne m’aimaient pas ou qu’ils ne s’intéressaient pas à mon sport, mais que c’était une marque de confiance et d’autonomie.
Faire la différence entre la salle de classe et le reste
Je fais partie des enfants sauvages pour les activités extra-scolaires mais je n’étais pas terrifiée à l’idée d’aller à l’école. L’école pour moi, c’était la salle de classe, la salle de classe c’était apprendre, apprendre c’était bien. Par contre, hors de question d’assister au reste, la cantine, les études et la garderie.
Si vous avez des enfants zèbres qui ont des difficultés à aller à l’école, il est important d’identifier d’où vient le problème :
- la maîtresse ou le maître
- les récréations
- la cantine
- les autres enfants
- le fait que vous, parents, ne soyez pas là
- être assis toute la journée
- devoir obéir
- les contraintes (si oui, identifier lesquelles)
Posez lui simplement la question en précisant qu’il peut tout vous dire et que vous pouvez tout comprendre.
Un enfant zèbre, une attention particulière
Un enfant zèbre a des besoins très particuliers au sein de son parcours scolaire. L’idéal reste de trouver une maîtresse ou un maître très à l’écoute et ouvert au sujet de la douance. Un enfant zèbre, encore plus que les autres, nécessite de l’attention, un suivi spécifique, des exercices adaptés, de la patience et de la sensibilité.
La maternelle et la primaire permettent déjà de repérer les premiers signes de précocité mais l’endroit où s’effectue la bascule reste bien souvent le collège. Le décrochage complet a plutôt lieu au lycée, même si, parfois, certains adolescents précoces arrivent, enfin, à y trouver leur place.
Rien n’est tracé, Rien n’est prémédité
Merci beaucoup d’être là, merci beaucoup d’avoir lu cet article jusqu’au bout.
Je vous souhaite une belle fin de journée, une belle semaine. Prenez bien soin de vous.
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